Numéro |
Cah. Myol.
Numéro 23, juillet 2021
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Page(s) | 28 - 30 | |
Section | Partenariats / Partnerships | |
DOI | https://doi.org/10.1051/myolog/202123010 | |
Publié en ligne | 2 août 2021 |
La prise en charge des neuropathies inflammatoires et dysimmunitaires à l’épreuve du confinement
Management of inflammatory and dysimmune neuropathies confronted with confinement
Président, Association Française contre les Neuropathies Périphériques (AFNP) Président, European PatientOrganisation for Dysimmune and Inflammatory Neuropathies (EPODIN)
* Contact jean-philippe.plancon@neuropathies-peripheriques.org
La pandémie de COVID-19 et ses conséquences, notamment en termes d’accès aux soins, a bouleversé les schémas de prise en charge des maladies rares et complexes. Les neuropathies périphériques inflammatoires et dysimmunitaires (NIPD) ne font pas exception. L’association qui représente les patients concernés en France par ces pathologies a réalisé une enquête pour mesurer l’impact du confinement sur leurs problématiques de santé à titre individuel.
© J.P. Plançon, publié par EDP Sciences, 2021
Cet article est distribué sous licence « Creative Commons » : https://creativecommons.org/licenses/by/4.0/deed.fr, permettant une ré-utilisation du contenu sans restriction à condition de mentionner clairement la source.
Introduction
L’épidémie de la COVID-19 qui a frappé le monde en 2020 a bouleversé la vie de tous pendant de longues semaines. Elle a conduit les autorités françaises à prendre des mesures limitant drastiquement la liberté de circulation et, par voie de conséquence, les interactions sociales. Durant cette période dite de « confinement », le système de santé a subi une mutation très profonde qui pourrait avoir un caractère durable. Les patients atteints de maladies neuromusculaires et singulièrement ceux atteints de neuropathies périphériques inflammatoires et dysimmunitaires (NPID) ont été contraints de s’adapter à ce changement brutal de mode de vie, changement dont l’impact sanitaire n’a jusqu’ici pas été véritablement évalué.
Objectifs
L’Association Française contre les Neuropathies Périphériques (AFNP) accompagne depuis près de quinze ans, au niveau national, les malades atteints de NPID (i.e. polyradiculonévrite inflammatoire démyélinisante chronique, neuropathie motrice multifocale, syndrome de Lewis-Sumner, syndrome de Guillain-Barré, neuropathies dysglobulinémiques, ou autres...). L’AFNP a mené pendant la période du confinement une enquête visant à évaluer : 1) l’impact de cette période singulière sur l’accès aux soins pour les patients atteints de NPID; 2) le nombre de personnes touchées par la COVID-19 au sein de cette population et 3) les possibles retentissements de la pandémie dans cette population de malades.
Méthodologie
Soixante-dix-huit patients atteints d’une NIPD (voir Tableau I) répartis sur l’ensemble du territoire national, et connus de l’AFNP, ont participé à une enquête réalisée pendant la première période de confinement. Celle-ci se présentait sous la forme d’un questionnaire remplissable en ligne, et était basée sur le principe des résultats déclarés par le patient (PRO pour patient reported outcomes). Les principaux éléments recueillis étaient : l’âge, le type de pathologie, le statut de la personne vis-à-vis de l’infection au SARS-CoV-2 (sur la base d’un diagnostic posé par un médecin), et l’accès aux soins en lien avec leur maladie de fond.
Résultats
14% des patients NPID questionnés ont déclaré avoir été touchés par la COVID-19 et 30% d’entre eux ont évoqué des signes d’exacerbation de leur maladie neuromusculaire à cette occasion. Il s’agissait principalement de fatigue, de douleurs, et d’une majoration du déficit moteur.
73% des patients n’ont pas reçu leurs soins habituels en lien avec leur NPID, 60% par manque d’accessibilité aux services de soins ou aux professionnels de santé chargés de leur prise en charge en temps normal. 10% des malades ont fait le choix de ne pas se déplacer vers les lieux de soins, par peur ou inquiétude d’être contaminés par le virus.
Les soins auxquels les patients n’ont pas eu accès concernaient la rééducation (46% des malades) et certains traitements indispensables au maintien de leur autonomie physique (i.e. corticoïdes, immunomodulateurs, immunoglobulines, antalgiques).
SARS-CoV-2. © Manuel Rosa-Calatrava, Inserm; OlivierTerrier, CNRS; Andrés Pizzorno, Signia Therapeutics; Elisabeth Errazuriz-Cerda UCBL1 CIQLE. VirPath (Centre international de recherche en infectiologie, unité Inserm 1111-UMR 5308 CNRS - ENSLyon-UCBLl). Colorisée par NoaRosaC.
Commentaire
L’enquête présentée ici a permis d’obtenir des données intéressantes à partir d’un nombre certes restreint de patients atteints de NPID mais assez significatif au regard à la rareté de ces pathologies. Elle a montré que la période de confinement liée à la COVID-19 et l’adaptation provisoire du système de santé ont empêché une très grande majorité de personnes vivant avec une neuropathie inflammatoire ou dysimmunitaire d’accéder aux structures de soins pour y recevoir leurs traitements habituels, ou de rencontrer les professionnels de santé, en particulier ceux œuvrant, en libéral ou non, dans le domaine de la rééducation.
Par crainte du virus, un nombre non négligeable de malades NPID a fait le choix de mettre son suivi médical entre parenthèses durant cette période de crise sanitaire.
Enfin, une partie des malades touchés par la COVID-19 a rapporté une exacerbation des symptômes habituels de leur neuropathie, laissant apparaître le besoin d’évaluer plus précisément cela sur un échantillon plus large de personnes concernées.
Une évaluation rétrospective de grande ampleur en cours dans les maladies neuromusculaires
Le confinement a été mis en application pour réduire les risques sanitaires à l’échelle de la population générale. Toutefois, aucune étude dirigée par les pouvoirs publics n’a à notre connaissance été menée pour évaluer avec précision les effets de la réorganisation de notre système de santé pendant cette période aigue et à son décours, chez les malades chroniques et singulièrement sur la population de personnes touchées par une maladie neuromusculaire.
Une grande enquête destinée à mettre en évidence les conséquences de la pandémie de COVID-19 (pendant et après le confinement) sur l’autonomie, la prise en charge et la psychologie des patients neuromusculaires adultes et enfants a vu le jour dans le dernier trimestre 2020. Elle est menée en partenariat avec la filière de santé maladies rares FILNEMUS, le CHU de Bordeaux et les associations de patients (Association Française contre les Myopathies, AFNP, Association Française contre l’Amylose (AFCA), CMT-France, Association Française contre les Maladies Mitochondriales (AMMI), toutes membres de la filière neuromusculaire. Gageons qu’elle apporte aussi des données utiles à tous les acteurs de santé et offre, non seulement la possibilité de mieux comprendre l’impact de cette période sur une population de malades, mais aussi d’améliorer notre système de santé dont l’ambition est de prendre en charge ses malades en toutes circonstances.
Liens d’intérêt
L’auteur déclare n’avoir aucun lien d’intérêt concernant les données publiées dans cet article.
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