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Open Access
Numéro
Cah. Myol.
Numéro 15, Juin 2017
Page(s) 41 - 41
Section Lu pour vous / Literature review
DOI https://doi.org/10.1051/myolog/201715010
Publié en ligne 23 juin 2017

Myasthénie auto-immune : quel impact sur la fatigue et la cognition ?

Claire-Cécile Michon
Psychologue, PhD AFM-Téléthon, Évry, France Service de Génétique, GH Pitié-Salpêtrière, Paris, France. Contact ccmichon@afm-telethon.fr

Christian Réveillère
AFM-Téléthon, Évry, France. Attaché au Centre de Référence Maladies Neuromusculaires, CHU Henri Mondor, Créteil, France. Professeur, Université de Tours, France. Contact creveillere@afm-telethon.fr

Résumé

La fatigue englobe à la fois la perception subjective de fatigue et la fatigabilité de la performance (performance fatigability) en tant que réactions physiologiques à une activité physique ou cognitive. La fatigue cognitive a été fréquemment rapportée par les patients atteints de myasthénie auto-immune (MG) en dehors de la fatigue physique. Dans le but d’évaluer de façon objective cette fatigabilité cognitive (par hétéro-évaluation, c’est-à-dire évaluée par un professionnel, par opposition à l’auto-évaluation faite par le patient lui-même) [1], 33 patients atteints de MG généralisée stable et 17 témoins en bonne santé ont passé une batterie de tests, comportant plusieurs épreuves d’attention et de concentration : le d2-R évaluant l’attention soutenue et sélective - et réalisé à deux reprises dans le bilan - et le PASAT évaluant l’attention soutenue et divisée. Ce test permet de dépister des déficits discrets mais pathologiques chez des individus se plaignant d’une baisse de leurs ressources attentionnelles. L’évaluation de la fatigue a été basée sur le calcul de la tendance linéaire (TL) reflétant la dynamique de la performance individuelle dans des intervalles de temps constants successifs. De plus, des auto-questionnaires sur la fatigue ont été utilisés pour mesurer la fatigue subjective.

Les résultats mettent en évidence une baisse de la TL à la deuxième passation du d2-R par rapport à la première dans le groupe de patients MG. Ceci révèle l’existence d’une fatigabilité cognitive. Dans le groupe témoin, la TL moyenne est positive et inchangée, ce qui indique une performance cognitive stable entre les deux passations du d2-R. La différence entre les deux groupes (MG et témoin) est statistiquement significative (P < 0, 05). Par ailleurs, la fatigue cognitive subjective (par auto-questionnaires) est significativement plus élevée chez les patients MG que chez les témoins (P < 0, 001), mais n’est pas corrélée avec la TL. Enfin, aucune différence significative n’est observée au PASAT entre les deux groupes.

Commentaire

La fatigue cognitive correspond à une diminution des performances en raison de la perte de concentration et d’attention. Environ 50% des patients MG déclarent souffrir d’une fatigue cognitive en plus de la fati- gabilité physique [1]. Grâce à la double méthodologie de la présente étude, nous pouvons retenir trois principaux résultats : (1) la mesure répétée de l’attention et de la concentration (TL, tendance linéaire) en hétéro-évaluation a permis de quantifier une baisse de performance ou une fatigabilité cognitive objective chez les patients MG; (2) les auto-questionnaires ont identifié une fatigue subjective ou auto-perçue et (3) l’absence de lien entre fatigue cognitive objective et fatigue cognitive subjective. Pour les auteurs, la fatigue objective, ou déclin objectif de la performance individuelle au cours de l’exécution d’une tâche, serait une « fatigabilité périphérique » qui doit être différenciée de celle liée à des facteurs centraux. Cela va dans le sens des résultats d’une autre étude [2] utilisant une batterie de tests neuropsychologiques (évaluant le fonctionnement cognitif global, l’apprentissage verbal, l’attention, les fonctions exécutives et la performance motrice). Les auteurs ont observé que dans les tâches nécessitant une implication motrice, et particulièrement oculomotrice, la fatigue des muscles oculomoteurs pourrait expliquer les déficits observés. Les difficultés cognitives mises en évidence dans la MG devraient être interprétées comme un effet de la fatigabilité musculaire oculomotrice plutôt que de l’atteinte du système nerveux central.

L’absence de lien entre fatigue objective et fatigue subjective est intéressante sur un plan clinique. À partir de la plainte « générique » de fatigue exprimée par un patient, cela montre l’intérêt qu’il y a à distinguer et évaluer ce qui revient respectivement à la fatigue objective d’une part et à la fatigue subjective d’autre part.

Myasthenia gravis: what impact on fatigue and cognition?

Liens d’intérêt

Les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêt concernant les données publiées dans cet article.

Référence

  1. Jordan B, Schweden TL, Mehl T, Menge U, Zierz S. Cognitive fatigue in patients with myasthenia gravis. Muscle Nerve 2016 Dec 29. doi : 10.1002/mus.25540.

  2. Sitek EJ, Bilinska MM, WieczorekD, Nyka WM. Neuropsychological assessment in myasthenia gravis. Neurol Sci 2009;30:9-14.


© C.-C.Michon et C. Réveillère, publié par EDP Sciences, 2017

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