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Open Access
Numéro
Cah. Myol.
Numéro 15, Juin 2017
Page(s) 49 - 55
Section Infos / News
DOI https://doi.org/10.1051/myolog/201715014
Publié en ligne 23 juin 2017

© S. Marion, publié par EDP Sciences, 2017

Licence Creative CommonsCet article est distribué sous licence « Creative Commons » : http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/deed.fr/, permettant une ré-utilisation du contenu sans restriction à condition de mentionner clairement la source.

Protocole national de diagnostic et de soins

• Les éléments clés

D’après les communications des Drs Marine Tardieu et Pascal Laforêt

Publié en juillet 2016, le Protocole national de diagnostic et de soins (PNDS) sur la maladie de Pompe1 détaille les modalités de diagnostic, de traitement et de suivi à l’attention des professionnels de santé. Il aborde les différentes formes de la maladie : infantile, juvénile et adulte.

Chez l’adulte

Tout déficit musculaire des ceintures doit faire évoquer une maladie de Pompe. Le diagnostic de certitude repose sur la mise en évidence dans le sang, par un laboratoire spécialisé, d’un déficit en alpha- glucosidase acide (GAA) ou maltase acide, qui doit toujours être confirmé par un second dosage. Dès lors, le suivi devra être régulier (à minima une fois par an) dans un centre de référence ou de compétences des maladies neuromusculaires. Leur liste figure en annexe du PNDS, qui précise également quelles sont les évaluations recommandées et à quel rythme les réaliser.

Un traitement par enzymothérapie substitutive (Myozyme®) est indiqué pour tout adulte atteint de façon certaine d’une maladie de Pompe et symptomatique, c’est-à-dire qui présente une faiblesse musculaire détectable (ceinture, axiale) et/ou une atteinte respiratoire clinique ou infraclinique décelée sur les épreuves fonctionnelles respiratoires. L’instauration de ce traitement doit faire l’objet d’une validation multidisciplinaire au sein d’un centre de référence ou de compétences. Dans les situations complexes, par exemple une forme asymptomatique ou au contraire une forme grave de diagnostic tardif, il est possible de solliciter pour avis le Comité d’Évaluation du Traitement de la maladie de Pompe (CETP). Le suivi optimal sous traitement comporte une évaluation initiale, à 6 mois, à un an puis tous les ans. Un arrêt du traitement peut être envisagé en cas de survenue d’effets secondaires graves (notamment allergiques), si le patient le demande ou encore si le médecin estime que l’enzymothérapie substitutive n’est plus indiquée, voire contre-indi- quée. La décision sera bien pesée, en gardant à l’esprit que l’état clinique du patient peut se dégrader après l’arrêt du Myozyme®. Là encore, l’avis du CETP peut être sollicité.

Chez l’enfant et l’adolescent (formes infantile et juvénile)

Le PNDS insiste sur la nécessité d’une annonce diagnostique réalisée par un médecin qui a l’habitude de la maladie de Pompe, une pathologie désormais traitable par enzymothérapie substitutive mais qui demeure non guérissable. En théorie, le traitement doit être débuté de façon la plus précoce possible chez tout enfant atteint d’une forme infantile de maladie de Pompe confirmée. En pratique, des critères supplémentaires interviennent dans la décision thérapeutique et notamment la sévérité clinique, la dépendance vis-à-vis de la ventilation invasive et l’avis des parents.

Dans la forme infantile, l’enzymothérapie substitutive a profondément modifié le pronostic. Avant son apparition, le décès intervenait au cours de la première année. Néanmoins, certains enfants échappent à terme au traitement substitutif. D’autres s’aggravent malgré lui (non-répondeurs). Différents facteurs de mauvaise réponse thérapeutique sont évoqués, à commencer par une mauvaise diffusion du Myozyme® dans les tissus, ce qui pourrait faire augmenter la posologie. Si le PNDS recommande la dose de 20 mg/kg/14 jours, son augmentation peut être envisagée au cas par cas après avis du CETP. Certaines équipes utilisent des posologies jusqu’à quatre fois supérieures (40 mg/kg/7 jours), sans preuve d’efficacité avérée. Une collecte de données, à l’initiative du réseau EPOC (European POmpe Consortium) et auquel la France participe, est en cours actuellement sur le sujet.

Une réponse insuffisante au Myozyme® pourrait également s’expliquer par une mauvaise pénétration du produit dans les lysosomes. Plusieurs pistes sont à l’étude pour améliorer le ciblage de l’enzyme recombinante, dont celle de la néoGAA (voir plus loin).

Le patient peut également produire des anticorps dirigés contre l’enzyme recombinante, possiblement inhibiteurs et qui pourraient favoriser les réactions immuno-allergiques au traitement. Ces anticorps doivent être recherchés chez tous les enfants traités atteints d’une forme infantile de la maladie.

Le statut CRIM (Cross Reactive Immune Material) est un autre paramètre influant la réponse à l’enzy- mothérapie substitutive. Il doit donc être déterminé en urgence dès le diagnostic posé dans la forme infantile. Un statut CRIM négatif signe l’absence d’enzyme native (GAA) détectable et fait discuter une immunosuppression transitoire (trois à quatre semaines) pré-thérapeutique, en raison d’un risque élevé de production d’anticorps anti-enzyme recombinante sous traitement. Si de tels anticorps sont produits, une deuxième cure d’immunosuppresseurs est discutée. Le protocole d’immunosuppression diffère actuellement selon les équipes. Il reste à harmoniser au niveau international.

Enfin, deux autres facteurs de mauvaise réponse au traitement sont évoqués : l’atteinte du système nerveux central (cerveau et corne antérieure de la moelle épinière) et la sévérité de la maladie.

Le PNDS ne précise pas les critères d’arrêt de l’enzy- mothérapie substitutive dans la forme infantile, même si certains éléments comme une insuffisance respiratoire sévère, un état grabataire ou une réaction majeure au Myozyme® ont une valeur d’alerte. La décision se prend au cas par cas, de façon pluridisciplinaire, avec les parents et en sollicitant si besoin l’avis du CETP.

Effets de l’enzymothérapie substitutive

• Des données récentes dans les formes tardives de la maladie

D’après les communications du Pr François Feillet, des Drs Constantinos Papadopoulos et Claudio Semplicim

Forme juvénile

La forme juvénile de la maladie de Pompe peut se manifester de façon très diverse, depuis des tableaux graves (détresse respiratoire, assistance ventilatoire permanente) jusqu’à des formes mineures avec fati- gabilité à l’effort, myalgies, ou même simples perturbations biologiques comme une élévation des CPK. Des signes plus rares, tel un syndrome de colonne raide (rigid spine) ou une faiblesse musculaire faciale, ont été décrits.

Les enfants et les adolescents atteints d’une forme juvénile de la maladie de Pompe sont très peu nombreux. Les cas décrits d’enzymothérapie substitutive dans cette population sont donc rares. Si l’évolution sous traitement, à génotype identique, semble très hétérogène, le bénéfice musculaire parait évident. Une étude publiée en 2014, après six ans de suivi [1], retrouve une amélioration des fonctions motrices sous Myozyme®. Une autre étude (trois cas) conclut également à une amélioration, mais uniquement en cas de traitement précoce. Le gain semble plus modéré pour les formes évoluées de la maladie. La précocité du diagnostic revêt donc toute son importance, or au moins un tiers des patients diagnostiqués à l’âge adulte ont eu des symptômes dès l’enfance (fatigabilité, difficultés en cours de sports…).

Forme adulte

  • Les cas sévères

    L’essai LOTS [2] a démontré, en 2010, l’efficacité de l’enzymothérapie substitutive dans la forme adulte de la maladie de Pompe, mais il excluait les formes sévères. Dès lors, faut-il ou non traiter par Myozyme® un patient en fauteuil roulant et sous ventilation continue ? Les recommandations internationales (Canada [3], Suède, European Neuromuscular Centre ou ENMC) divergent sur ce point. Différentes publications de cas isolés ont rapportés des résultats discordants.

    Une étude rétrospective [4] menée sur le registre français de la maladie de Pompe apporte un éclairage nouveau. Sur les douze adultes du registre atteints d’une forme sévère et traités par enzymo- thérapie substitutive, dix se sont déclarés satisfaits du traitement, trois ont pu réduire leur assistance respiratoire, deux ont augmenté leur distance de marche et cinq sont décédés (dont quatre de causes respiratoires). Chez certains patients, le traitement semble donc bénéfique.

    Des recommandations européennes, à paraître dans l’European Journal of Neurology, vont dans le même sens : l’instauration d’une enzymothérapie substitutive peut être envisagée chez les adultes atteints d’une forme sévère afin de préserver leur niveau d’indépendance et leur possibilité d’accomplir certains actes de la vie quotidienne.

  • L’effet à long terme

    Une autre étude menée à partir du registre français de la maladie de Pompe a exploré cette fois les effets à long terme de l’enzymothérapie substitutive. Elle a porté sur 190 patients (14 enfants et 176 adultes) soit tous ceux qui ne sont pas atteints d’une forme infantile classique de la maladie. Une analyse statistique détaillée montre, sous enzymothérapie substitutive, une amélioration du test de marche de près de 5% sur les premiers dix-huit mois de traitement, puis sa diminution de 2% par an. L’évolution de la capacité vitale (CV) suit pour sa part, non pas deux phases, mais une seule avec une diminution progressive d’environ 1% par an en dix années de traitement. Ces résultats sont similaires à ceux d’études antérieures. Une nouvelle analyse du registre, non encore publiée, montre par ailleurs une évolution diphasique (amélioration puis diminution progressive) de la dimension D1 (station debout et transferts) de l’échelle de Mesure de la Fonction Motrice (MFM). La pression inspiratoire maximale (MIP) suit également deux pentes sur une durée de dix ans, alors que la pression expiratoire maximale (MEP) demeure stable sur la même période.

    Cette étude permet de conclure à des effets thérapeutiques à long terme modérés sur les tests moteurs, plus évidents dans les premiers mois, et à une stabilisation des paramètres respiratoires. Enfin, aucun critère prédictif de réponse au traitement n’a été retrouvé et notamment pas l’âge au début de la maladie, ni le sexe, ni le taux d’anticorps anti-enzyme recombinante, ni la durée de la maladie, ni la mutation génétique en cause. Ces résultats sont autant d’arguments à prendre en compte quand se pose la question de traiter un patient asymptomatique, d’autant qu’il pourra le rester des années (cas publiés) et que l’enzymothérapie est un traitement lourd.

Atteinte vasculaire dans la forme adulte

• Un nouveau phénotype ?

D’après une communication du Pr Sabrina Sacconi

Dans la forme adulte de la maladie de Pompe, l’accumulation de glycogène concerne les muscles, mais aussi le cerveau (troubles cognitifs chez certains patients), les os (ostéoporose plus fréquente), le cœur (cas de troubles de la conduction), le tractus digestif et les voies urinaires (incontinence, urgence urinaire). Les vaisseaux (artères et veinules) peuvent également être touchés, par atteinte de leurs muscles lisses (accumulation de glycogène, vacuoles autophagiques) mais aussi du fait de l’éventuelle atteinte respiratoire, l’hypoxie pouvant jouer un rôle sur le remodelage des parois artérielles.

En 2008, une publication relatait une série de onze patients atteints d’une maladie de Pompe et qui avaient fait un accident vasculaire cérébral (AVC) le plus souvent hémorragique, parfois létal.

Une étude menée à Nice sur six patients [5] a permis de déceler des anomalies des artères intracérébrales (ectasie) chez quatre d’entre eux. Elles étaient le plus souvent asymptomatiques, associées à une atteinte d’autres muscles lisses (gastro-intestinaux et/ou vési- caux) et se sont améliorées sous enzymothérapie substitutive.

D’autres artères peuvent être concernées d’après différentes études, qui ont retrouvé une possible augmentation de la rigidité de l’aorte et de la tension artérielle, des dilatations de l’aorte thoracique ascendante, parfois symptomatique (douleurs thoracique, dyspnée), des ectasies des artères rénales et iliaques (douleurs abdominales).

Toutes localisations confondues, les atteintes artérielles semblent donc fréquentes, surtout si le diagnostic a été précoce. Elles sont parfois le premier symptôme de la maladie de Pompe. Leur dépistage chez les patients jeunes, et leur suivi chez ceux qui présentent une insuffisance respiratoire, pourraient présenter un intérêt pour prévenir des complications vasculaires. Le Protocole national de diagnostic et de soins (PNDS) sur la Maladie de Pompe ne recommande pas un tel dépistage systématique pour les artères cérébrales (angioscanner). En revanche, il n’aborde pas la recherche d’anomalies des artères abdominales, qui pourraient s’avérer pertinente car possiblement accessibles à un traitement curatif. L’effet protecteur de l’enzymothérapie substitutive sur les atteintes vasculaires de la maladie reste pour sa part à démontrer. De même, la question de savoir s’il s’agit d’un nouveau phénotype de la maladie de Pompe reste posée. Enfin, l’atteinte veineuse demeure peu évaluée. Elle pourrait jouer un rôle dans le manque d’efficacité de l’enzymothérapie substitutive sur les muscles distaux chez les enfants.

Évaluation psychologique des adultes sous enzymothérapie

• Une étude en préparation

D’après une communication de Sabrina Sayah

L’enzymothérapie substitutive est un traitement lourd, que les patients savent très coûteux et d’efficacité variable… Autant d’éléments qui ont des impacts psychologiques, au demeurant peu évalués. Un travail collaboratif vient de débuter, qui associe l’Association francophone des glycogénoses (AFG), l’association Vaincre les maladies lysosomales (VLM) et deux équipes hospitalières (Paris, Bordeaux). Il porte sur la perception subjective du traitement, son vécu par les patients, leurs attentes et la façon dont ils s’adaptent aux contraintes que leur impose l’enzymothérapie substitutive.

L’équipe en charge de ce projet a déjà rencontré onze patients, dans l’objectif d’élaborer avec eux un questionnaire. Tous décrivent une stabilisation de leur état de santé sous traitement. L’enzymothérapie substitutive « médicalise » fortement leur vie et les oblige à s’adapter sur le plan professionnel comme privé (vacances, grossesse…). Les patients se sentent privilégiés de bénéficier d’un traitement, envers lequel ils éprouvent une dépendance, se sentant même coupables s’ils ratent une perfusion. Dans le même temps, ils expriment une crainte d’être abandonnés (puisqu’ils sont désormais traités) et ont le sentiment d’être moins bien suivis qu’avant. Par ailleurs, les patients traités dans le même service hospitalier, et les mêmes jours, forment une véritable « famille ». Enfin, il existe une demande de soutien psychologique en raison des contraintes imposées par les perfusions répétées et du caractère évolutif de la maladie. L’ensemble de ces points sera abordé dans le questionnaire en cours d’élaboration et qui sera distribué in fine à tous les patients adultes atteints de maladie de Pompe et traités par enzymo- thérapie substitutive. Il sera couplé notamment à des échelles de qualité de vie.

Traitements

• Le point sur quatre nouvelles approches

1. Une thérapie génique à ciblage hépatique

D’après une communication du Dr Federico Mingozzi

Les virus associés à l’adénovirus (adeno-associated virus ou AAV) sont très utilisés comme vecteur pour transporter les acides nucléiques thérapeutiques jusqu’aux cellules malades. Il est possible de les employer pour atteindre de façon spécifique un tissu donné comme le foie, le cerveau ou la rétine. Dans la maladie de Pompe, cibler les cellules hépatiques nécessite des doses de vecteurs bien plus faibles que de cibler l’ensemble des muscles. Cette approche laisse également espérer une meilleure tolérance immunitaire.

C’est une piste explorée par l’équipe du Dr Federico Mingozzi, au Généthon [6]. Elle utilise un vecteur AAV qui contient un gène GAA modifié (codant l’alpha-glucosidase acide, déficitaire dans la maladie de Pompe), sous contrôle d’un promoteur spécifique des hépatocytes et cible donc le foie. Ce vecteur pénètre dans le noyau des hépatocytes, qui secrè- tent dès lors l’enzyme GAA et la libèrent dans le sang à destination des autres organes, d’où une correction de la maladie dans l’ensemble du corps (cross correction).

Cette approche « corps entier » (whole body cross correction of Pompe disease) a nécessité d’utiliser des techniques d’ingénierie moléculaire afin de rendre la protéine (GAA) sécrétable par l’hépato- cyte. Huit mois après l’injection de l’AAV codant une forme sécrétable de la GAA à des souris modèles de la maladie de Pompe, le niveau d’enzyme GAA dans le sang s’est avéré très supérieur à celui retrouvé dans le sang de souris modèles qui avaient reçu la version sauvage (non modifiée) de la GAA. Or il pourrait exister une relation entre le taux plasmatique de GAA, sécrété par le foie, et l’activité enzymatique dans les différents tissus. La forme sécrétable de la GAA s’est avérée d’efficacité supérieure sur les muscles (structure, accumulation du glycogène, auto- phagie). C’est la seule à avoir entrainé une correction partielle (environ -50%) du glycogène accumulé dans le cerveau des souris, une normalisation des marqueurs de l’inflammation et une réduction de la mort des neurones de la moelle épinière. Cette thérapie génique a augmenté la survie des souris, amélioré de façon significative leur fonction respiratoire, corrigé leur hypertrophie cardiaque et amélioré leur force musculaire. Enfin, elle s’est accompagnée d’une meilleure tolérance immunitaire (moins d’anticorps anti-GAA sécrétés) que la forme sauvage.

Une étude a également été menée chez le singe, avec injection d’AAV ciblés sur les hépatocytes à des doses utilisées chez l’homme dans une autre maladie (hémophilie). En comparaison à des animaux contrôles, cette injection a bien entrainé une sécrétion de GAA, retrouvée dans le sang et surexprimée dans les muscles, qui l’ont donc bien captée dans la circulation. Ces résultats sont de bon augure dans la perspective d’un essai chez l’Homme.

2. Le développement de la néoGAA se poursuit

D’après une communication du Pr Sabrina Sacconi

La néoGAA est une enzyme recombinante de nouvelle génération développée à partir du Myozyme® pour en améliorer l’efficacité, grâce à l’ajout à sa surface de bismannose-6-phosphate. Un premier essai clinique international multicentrique (NEO1) a évalué des doses croissantes (5, 10 et 20 mg/kg toutes les deux semaines) de néoGAA sur deux groupes de patients âgés de dix-huit ans ou plus, ambulants (marche sur cinquante mètres sans s’arrêter) et dont la capacité vitale (CV) était supérieure ou égale à 50% de la théorique. Les uns étaient naïfs d’enzymothérapie substitutive, les autres traités par Myozyme® depuis au moins six mois. Vingt-cinq centres, aux États-Unis et en Europe (dont Marseille, Nice et Paris) ont participé à cette étude.

Le deuxième essai clinique, NeoGAAEXT, est une extension de NEO1 aux mêmes patients avec pour objectif d’évaluer l’innocuité et l’efficacité de la néoGAA à long terme. Les centres participants sont les mêmes. Le premier patient a été inclus en février 2014. La fin de l’essai est prévue pour mars 2020. À l’heure actuelle, dix-huit patients (dont trois en France) y participent et ils reçoivent tous 20 mg/ kg/14 jours de néoGAA.

Un troisième essai clinique (COMET ou EFC14028-néoGAA) a débuté récemment. Cet essai international de phase III randomisé en double aveugle (néoGAA versus Myozyme®) prévoit l’inclusion de quatre-vingt six patients, recevant 20 mg/ kg/2 semaines d’enzyme recombinante pendant trente-six mois. Les critères d’inclusion sont un diagnostic de maladie de Pompe confirmé et/ou deux mutations avérées du gène GAA et un âge supérieur à trois ans. Les centres participants se situent en Asie, aux États-Unis et en Europe (huit sites en France). Ce nouvel essai a pour objectif d’évaluer l’innocuité de la néoGAA et son efficacité avec pour critère principal l’évolution de la CV (en pourcentage de la valeur théorique) en position verticale à la semaine 49.

3. NanoMedSyn, une nouvelle piste d’enzymothérapie substitutive

D’après une communication du Dr Marcel Garcia

La technologie développée par la société NanoMedSyn vise à améliorer l’efficacité des traitements enzymatiques de substitution des maladies lysoso- males, à commencer par la maladie de Pompe. Elle consiste à coupler l’enzyme recombinante à un analogue synthétique du mannose 6-phosphate (M6P) : l’AMFApour Analogue of M6PFunctionalized on Aglycone. Il cible le récepteur cellulaire du mannose 6-phosphate (MP6R), que l’on sait impliqué dans les mécanismes d’adressage des enzymes aux lyso- somes. L’enjeu du couplage GAA-AMFA est donc d’améliorer le ciblage et la pénétration cellulaire de l’enzyme recombinante. Ses avantages espérés sont une haute affinité pour le MP6R, une forte efficacité à faibles doses et une meilleure sécurité.

En laboratoire, la GAA-AMFA parvient à augmenter les capacités de marche de souris modèles de la maladie de Pompe, par rapport à des souris contrôles mais aussi par rapport à des souris traitées par Myozyme®. La biopsie musculaire montre une augmentation de l’activité GAA et une réduction des dépôts de glycogène dans les lysosomes [7]. Des résultats, non encore publiés, attestent également d’une efficacité sur la marche pour des souris plus âgées (10 à 12 mois, versus 6, 5 mois pour les résultats précédents). En 2016, ce produit a obtenu le statut de médicament orphelin de l’Agence européenne des médicaments (EMA) dans la maladie de Pompe. NanoMedsyn envisage désormais de lancer une étude clinique de phase I/II d’ici un an et demi à deux ans. Elle devrait inclure des patients stabilisés par Myozyme®. Ils seront traités avec des doses croissantes de GAA-AMFA, avec l’objectif de savoir si elles entrainent une amélioration motrice et respiratoire.

4. Moduler l’épissage à l’aide d’oligonucléotides antisens

D’après une communication du Dr Luis Garcia

En thérapie génique, les approches de modification d’épissage (splice switching) consistent à modifier l’ARN des cellules de patients atteints de maladies génétiques. Elles ont abouti au développement d’un médicament pour la dystrophie musculaire de Duchenne (DMD), déjà sur le marché aux États- Unis. Il repose sur l’utilisation d’oligonucléotides antisens (AON) capables de se lier aux ARN messagers (ARNm) du gène codant la protéine déficiente (dystrophine dans la DMD) et d’en moduler la maturation (épissage).

L’équipe de Luis Garcia a développé une nouvelle génération d’oligonucléotides antisens : les AON tri- cyclo-ADN (AON-tcDNA) [8]. Ils se sont montrés beaucoup plus puissants que les AON utilisés dans la souris modèle de DMD, avec une très forte affinité pour l’ARN et une large biodistribution (muscles squelettiques, foie, rein, cœur, cerveau). Après injection systémique à des souris modèles de DMD, les AON-tcDNA entrainent une amélioration des fonctions musculaire, respiratoire et cardiaque. Ils passent également la barrière hémato-encéphalique, avec amélioration des fonctions cognitives. Enfin, ils restent longtemps fonctionnels dans les cellules sans être dégradés ce qui pourrait permettre d’espacer les injections (1/mois).

Cette approche pourrait bénéficier à d’autres maladies génétiques, et notamment à la maladie de Pompe. C’est tout l’enjeu d’un projet mené en collaboration avec l’hôpital Raymond-Poincaré de Gar- ches. Il concerne la forme tardive de l’adulte de la maladie de Pompe, et la mutation commune, présente chez 90% des patients (c.-32-13T>G). Des tests menés in vitro ont montré que les cellules traitées par un type d’oligonucléotides antisens tri- cyclo-ADN produisent des quantités de GAA similaire à celles des sujets sains. Cet AON-tcDNA reconnait donc sa cible et « réhabilite » l’ARN. Reste à le tester in vivo, dans l’espèce humaine. Deux à trois ans de travail sont encore nécessaires avant de débuter un tel essai clinique, le temps de produire l’AON-tcDNA en quantité suffisante, de vérifier son innocuité chez l’animal aux posologies prévues chez l’homme, mais aussi de poursuivre les études de biodistribution et de toxicité.

Un projet européen pour favoriser l’accès précoce aux nouveaux médicaments

D’après une communication d’Anne-Sophie Lapointe

Sur 6 000 à 8 000 maladies rares, 5% seulement bénéficient d’un traitement. Il reste donc beaucoup à faire, mais le développement de nouveaux médicaments est un processus long et coûteux. Les candidats médicaments destinés à traiter une maladie rare sont soumis aujourd’hui aux mêmes étapes de développement que les autres, alors même qu’ils ciblent des pathologies particulières. Une maladie rare se caractérise en effet notamment par une longue période d’errance diagnostique, le besoin d’un accès précoce au traitement et le faible nombre de patients susceptibles de tester de nouveaux médicaments.

Des méthodes plus adaptées de conduite des essais cliniques sont nécessaires. Les MAPPs (Medicines Adaptive Pathways to Patients) pourraient constituer une solution adéquate. Conçues pour faciliter le développement et l’accès aux traitements, elles accélèrent la mise à disposition des nouveaux médicaments (phase I, phase II et passage en phase III beaucoup plus courts) tout en augmentant la durée des études d’efficacité en vie réelle. En pratique, la délivrance d’une autorisation de commercialisation (AMM) conditionnelle, provisoire, est suivie d’une longue période de suivi durant laquelle sont collectées des données sur ce qu’apporte aux patients concrètement, au quotidien, le nouveau médicament. L’autorisation de commercialisation (AMM) définitive est délivrée à l’issue de cette longue phase d’évaluation. Cette façon de procéder permettrait notamment d’évaluer la qualité de vie, un paramètre (non clinique) d’efficacité aujourd’hui peu ou mal mesuré. Elle pose cependant des interrogations, notamment éthiques. Un accès plus rapide à un nouveau médicament signifie aussi que ses risques ont été évalués moins longtemps.

La mise au point d’un modèle de MAPP fait actuellement l’objet d’un projet de recherche européen (ADAPT SMART2), lancé en juillet 2015 pour une durée de trente mois et auquel contribue la fédération européenne d’associations de patients atteints de maladies rares EURORDIS. Des tests d’autorisation avec ces nouvelles méthodes sont déjà menés par l’Agence européenne des médicaments (EMA).

Liens d’intérêt

L’auteur déclare n’avoir aucun lien d’intérêt concernant les données publiées dans cet article.


1

À consulter sur le site de la Haute Autorité de Santé.

2

Accelerated Development of Appropriate Patient Therapies : a Sustainable. Multi-stakeholder Approach from Research to Treatment-outcomes, à voir sur http://adaptsmart.eu/

Références

  1. Deroma L, Guerra M, Sechi A, et al. Enzyme replacement therapy in juvenile glycogenosis type II: a longitudinal study. Eur J Pediatr 2014; 173 : 805–13. [CrossRef] [PubMed] [Google Scholar]
  2. van der Ploeg AT, Clemens P, Corzo D, et al. A randomized study of alglucosidase alfa in late-onset Pompe’s disease. N Engl J Med 2010; 362 : 1396–406. [Google Scholar]
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  7. El Cheikh K, Basile I, Da Silva A, et al. Design of potent mannose 6-phosphate analogues for the functionalization of lysosomal enzymes to improve the treatment of Pompe disease. Angew Chem Int Ed Engl 2016; 55 : 14774–7. [CrossRef] [PubMed] [Google Scholar]
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